From sustainable ideas to measurable impact.

Réduction des déchets plastiques hospitaliers : Par où commencer ?

L'Allemgane démontre qu'on peut réduire les déchets plastiques hospitaliers

La formidable initiative de l’hôpital de Halle pour réduire les déchets plastiques hospitaliers – un cas d’étude allemand.

Le plastique est omniprésent en milieu hospitalier, offrant des solutions indispensables en termes d’hygiène, de sécurité et de fonctionnalité. Mais à quel prix environnemental ? Avec 619 grammes de consommables en plastique par patient et par jour dans un hôpital type, selon une étude allemande, il est urgent d’analyser ces flux pour mieux les maîtriser. Cet article explore la typologie et la quantification des plastiques médicaux à usage unique pour identifier des leviers de réduction des déchets en milieu hospitalier.

1. Une dépendance aux plastiques difficile à contourner

Les plastiques sont devenus un matériau indispensable en milieu hospitalier, intégrés à toutes les étapes des soins. Leur légèreté, leur polyvalence et leurs propriétés hygiéniques en font des alliés incontournables. Pourtant, derrière cette omniprésence se cache une dépendance massive. Les hôpitaux, véritables hubs d’activités médicales et de soutien, consomment des plastiques à la fois dans les dispositifs médicaux (seringues, gants, masques, cathéters) et dans des usages non médicaux comme la restauration, le nettoyage ou l’administration.

Deux grandes catégories de plastiques dominent ce secteur : les produits durables, utilisés sur plusieurs années, et les produits jetables, conçus pour être utilisés une seule fois avant élimination. Les consommables à usage unique, stériles et emballés individuellement, sont devenus la norme, entraînant une augmentation exponentielle des déchets.

Bien que l’Union européenne ait introduit une directive visant à réduire les plastiques à usage unique dans les secteurs non médicaux (gobelets, sacs, couverts), les efforts pour les consommables médicaux restent embryonnaires. Pourtant, les chiffres sont alarmants : 70 % des dispositifs médicaux sont constitués de polymères comme le polypropylène (PP), le polyéthylène (PE), le polystyrène (PS) et le polychlorure de vinyle (PVC). Ces matériaux dominent également les équipements de protection individuelle (EPI), qui représentent près de la moitié des consommables plastiques en milieu hospitalier.

Les défis sont nombreux. Les déchets plastiques hospitaliers contiennent jusqu’à 25 % de plastiques, un taux significativement plus élevé que les déchets municipaux. Parmi les principaux contributeurs figurent les emballages médicaux, les plastiques de cafétéria, les seringues, les poches de sang et les tubulures. Une enquête sur une unité de soins intensifs a révélé que 30 % des déchets étaient en plastique, mais cette opportunité reste largement sous-exploitée.

Cette efficacité des plastiques a aussi un coût. Dans l’hôpital de Halle, les scientifiques ont estimé que 3,1 kg de déchets étaient produits par patient et par jour, dont une part significative en plastique.

Les plastiques, bien que révolutionnaires, posent aujourd’hui un défi de taille pour la durabilité environnementale.

Problèmes pour réduire les déchets plastiques hospitaliers ? Une faible recyclabilité, des perceptions de risque liées à la contamination, et des flux massifs gérés principalement par incinération.

2. Traitement des déchets hospitaliers : Besoins et obstacles

L’incinération est la norme pour les déchets hospitaliers, en raison des préoccupations de contamination. Pourtant, seuls 15 % des déchets sont biologiquement dangereux, laissant une marge pour une gestion plus ciblée. En Allemagne, seulement 5 % des plastiques hospitaliers sont recyclés. Cette situation s’explique par plusieurs facteurs:

  • Diversité et mélange des matériaux : Les plastiques médicaux englobent une variété impressionnante de polymères comme le PP, le PVC ou le latex. Ces matériaux sont souvent mélangés à d’autres composants non plastiques, compliquant leur tri et leur recyclage
  • Perception du risque : Les craintes liées à la contamination biologique entraînent une gestion conservatrice des déchets, avec une incinération systématique, même pour les flux théoriquement recyclables.
  • Usage massif de produits jetables : En raison de leur coût et de leur praticité, les produits jetables se sont imposés dans les hôpitaux. Ces consommables stériles sont conçus pour un usage unique, multipliant ainsi les volumes de déchets.
  • Directive européenne insuffisante : Si l’UE s’est concentrée sur les plastiques à usage unique dans d’autres secteurs (vaisselle, sacs, etc.), les efforts comparables dans le domaine médical restent embryonnaires.

Les plastiques sont également omniprésents dans des activités non médicales comme la restauration ou la gestion administrative, contribuant à un mélange complexe de flux de déchets.

3. L’étude : Quantifier les déchets plastiques pour mieux agir

Bienvenue dans les coulisses d’une étude pas comme les autres, où chaque gérant d’hôpital pourra enfin mettre un poids exact sur sa montagne de plastique. Direction Halle, en Allemagne, au BG Klinikum Bergmannstrost, un centre de traumatologie bien rôdé, comptant 571 lits et enregistrant chaque année plus de 9000 interventions chirurgicales et passages aux urgences.

Le terrain est vaste, mais pas infini. Exit l’approvisionnement de nourriture, les services de maintenance et administratifs, et les soins à domicile : ici, on se concentre sur le cœur médical de l’hôpital.

L’équipe de recherche s’est attelée à disséquer six grandes catégories de produits :

  1. Dispositifs de contact (seringues, aiguilles, cathéters…)
  2. Anesthésie (masques)
  3. Equipements de protection individuelle (EPI) (tabliers, masques, gants…)
  4. Soins généraux (gants, produits d’hygiène personnel, gobelets, écouvillons…)
  5. Produits d’incontinence (lange, protèges matelas…) et
  6. besoins de stérilisation (sac de stérilisation, bouchons…)

Chaque catégorie a été minutieusement décortiquée, non sans l’aide du personnel hospitalier, pour examiner plus de 140 produits couvrant 95 % des plastiques consommables entre 2018 et 2019.

Comment ? En plongeant dans une base de données gargantuesque de 8600 articles annuels, dont seuls les plus pertinents ont survécu au filtre. Matériaux durables ? Dehors. Pansements en coton ? Merci, mais non merci. On garde l’essentiel : les consommables plastiques. Et quand l’information manquait, les chercheurs ont sorti le grand jeu : consultations des catalogues fournisseurs, démontages en atelier et approximations éclairées pour combler les blancs.

Côté polymères, le polypropylène (PP) mène la danse avec 45 % des parts, suivi par le latex (25 %) et le polyéthylène (PE) à 12 %. Et que dire des EPI, ces champions de la consommation, qui détiennent à eux seuls 52 % des flux plastiques, entre gants, masques et blouses. Les emballages, bien que pris en compte dans leur forme primaire et secondaire, restent une énigme dans leurs couches tertiaires (adieu, films étireurs et cartons trop complexes).

Un exercice d’équilibre, certes, mais cette étude pose les bases d’une compréhension précise et actionnable des flux plastiques hospitaliers. Car savoir, c’est (presque) recycler. L’équipement de protection individuelle (gants, masques, blouses) représente à lui seul 52 % des flux plastiques.

4. Comprendre les flux pour mieux les contrôler

Les résultats de l’étude sont à la fois révélateurs et, disons-le, un peu accablants. Commençons par un chiffre-clé : 619 grammes de consommables plastiques par patient et par jour, dont 531 grammes proviennent directement des flux plastiques. Si ces chiffres vous donnent le vertige, attendez de voir le détail.

Le roi incontesté des plastiques hospitaliers ? Les équipements de protection individuelle (EPI). Avec 304 grammes par patient et par jour, ils accaparent près de la moitié de la masse totale des consommables et plus de la moitié des flux plastiques (52 %). Parmi eux, les gants volent la vedette : 138 grammes de plastique quotidiennement par patient. Un record que personne ne voulait vraiment atteindre.

Et que dire des autres sous-catégories ? Les protections corporelles et faciales, composées principalement de masques, blouses, et autres textiles chirurgicaux, pèsent lourd dans la balance. Pourtant, ces derniers, utilisés presque exclusivement en bloc opératoire, restent marginaux en dehors des 9300 interventions chirurgicales annuelles.

En deuxième position, les produits d’incontinence avec 135 grammes par jour. Une proportion impressionnante (62 %) de leur masse provient des plastiques, principalement du polypropylène non tissé et du polyéthylène, utilisés pour les couches adultes et les protections de lit. Et si cela semble déjà beaucoup, n’oublions pas les volumes importants de cellulose qui composent ces produits et élèvent leur poids total.

Les dispositifs de contact arrivent ensuite avec 125 grammes par patient et par jour, dont 121 grammes de plastiques. Cette catégorie hétérogène inclut des produits variés comme les seringues, cathéters, et dispositifs de perfusion. Le polychlorure de vinyle (PVC), choisi pour sa malléabilité et sa résistance thermique, domine cette catégorie avec 41 % de la masse plastique.

Quant aux catégories restantes – soins généraux (37 grammes), anesthésie et stérilisation – elles jouent un rôle plus discret mais non négligeable. Les besoins de stérilisation, par exemple, sont étroitement liés aux équipements réutilisables, influençant indirectement la quantité de plastiques utilisés dans les consommables d’emballage.

Enfin, mentionnons les emballages plastiques : bien qu’ils ne représentent que 16 grammes par patient et par jour, leur omniprésence est une conséquence directe des exigences de stérilité. Les dispositifs de contact sont les plus gourmands, chaque kilo de produit générant 70 grammes d’emballage supplémentaire.

En somme, l’analyse montre une diversité impressionnante non seulement dans les produits mais aussi dans leurs compositions polymères. Le polypropylène reste le leader incontesté, suivi par le latex pour les gants, tandis que des polymères comme le PVC trouvent leur place dans des niches spécifiques. Une complexité qui, si elle est fascinante pour les ingénieurs, pose des défis monumentaux pour les recycleurs.

5. Conclusions

Les chiffres de cette étude parlent d’eux-mêmes : 619 grammes de plastique consommés par patient et par jour, soit environ un cinquième de tous les déchets hospitaliers. Parmi les principaux responsables, les équipements de protection individuelle (EPI) dominent avec 49 % de la masse totale des consommables, suivis par les produits d’incontinence et les dispositifs de contact. Le polypropylène (45 %) et le latex (25 %) figurent parmi les matériaux les plus utilisés, tandis que des polymères comme le PVC occupent des niches spécifiques.

Alors, comment réduire cet impact ?

  • Rationaliser la consommation d’EPI,
  • Adopter des alternatives comme la cellulose pour les produits d’incontinence,
  • Investir dans des infrastructures de tri, et
  • Privilégier le réutilisable sont des pistes prometteuses.

Ces mesures nécessitent une vision à long terme, mais elles pourraient transformer ces montagnes de déchets en opportunités d’innovation et de durabilité.

En conclusion, les plastiques médicaux resteront indispensables, mais leur gestion doit évoluer. Avec des efforts coordonnés, il est possible de réduire les déchets plastiques hospitaliers tout en maintenant la qualité des soins.